dimanche 4 novembre 2012

Petit récit au sujet de la P-26

Organisation militaire secrète  dissoute puis dévoilée dans les année 90, voici une petite mise en bouche qui traite de la P-26


Le bunker de la P-26 transformé en musée
 Propriétaire du bunker, Daniel Miescher, projette d’ouvrir un musée privé. Il veut faire revivre l’époque de la guerre mondiale et aussi de la P-26, cette armée secrète dont l’existence a été révélée en 1990

Une grange en bois insignifiante surplombe le lac de Thoune (BE). Son propriétaire Daniel Miescher ouvre la porte coulissante et déverrouille une grille, puis une porte blindée. Une échelle en métal verticale conduit le visiteur dans un des bunkers de "formation" de la légendaire armée secrète P-26.

Le nom de code de cette installation souterraine située près de Spiez, dans l’Oberland bernois, est «jardin alpin». Elle a été construite durant la Deuxième Guerre mondiale pour faire office de fort d’artillerie. Un système de galeries relie les trois bunkers au bâtiment d’entrée.

Toutes les parties situées en surface sont camouflées en granges. Un observateur attentif pourrait s’étonner de la présence de colonnes d’aération s’élevant du sol. Dans les années 1990, ces dernières étaient cachées derrière un faux rucher.

Fondues

Car sous la terre, les membres de la très secrète armée P-26 se préparaient à la situation de crise: l’invasion de la Suisse par une puissance ennemie.

Le propriétaire du bunker, qui l’a acquis en 2004, souhaite que l’installation retrouve le mieux possible son état d’origine. Le musée privé qu’il projette d’ouvrir doit faire revivre l’époque de la guerre mondiale et aussi de la P-26 (projet 26).

Il propose déjà des visites guidées, qui lui permettent depuis plusieurs années de rentrer dans ses frais. Le passionné est aussi prêt à louer le site pour des anniversaires ou des fêtes d’entreprise. Il est même possible d’y organiser une soirée fondue, puisque le système d’aération le permet.

Voyage secret

L’adresse se trouve aisément sur internet. Il n’en a évidemment pas toujours été ainsi. «Au début, je me rendais toujours à Thoune, d’où j’étais transbahuté dans un bus VW aux vitres teintées», se souvient «Wilfried», membre de l’armée de résistance, dans le dernier livre de l’historien Martin Matter.

«Wilfried» était enseignant en Suisse orientale et faisait partie des quelque 400 Suisses recrutés pour la P-26. Dans le «jardin alpin» et plus tard à Gstaad (BE), ils étaient formés au projet secret et acquéraient des connaissances techniques: guerre psychologique, sabotage ou radio à ondes courtes.

Salué par vidéo

Souvent, même les épouses de ces hommes ne savaient rien de leur double vie. Lorsqu’un membre de la P-26 était appelé pour un cours, il devait inventer une histoire plausible à raconter à sa famille et à son employeur pour justifier son absence.

Il se rendait ensuite à l’endroit convenu, par exemple à la gare de Thoune. Son voyage derrière les vitres teintées se terminait dans l’un des garages construits derrière l’un des bunkers d’artillerie. «De là, on descendait dans les profondeurs», rapporte Wilfried.

Dans le «jardin alpin», le participant au cours s’installait dans une chambre individuelle. Dans un message vidéo, le chef d’Etat- major le saluait et lui assurait que la P-26 était un élément officiel de l’ensemble des mesures de défense du pays. L’appelé suivait aussi par vidéo différentes leçons et exercices.

Signal lumineux et container

Car chaque membre de l’armée secrète devait connaître le moins possible de collègues. Ainsi, s’il était fait prisonnier, il n’aurait pas pu les dénoncer. Lorsque le participant quittait sa chambre, le couloir devait être vide. Un signal lumineux était installé à cet effet, montre le propriétaire du bunker Daniel Miescher.

L’énorme collection compte aussi un container d’acier long de 80 cm. En situation de crise, chaque membre de la P-26 aurait obtenu un tel objet étanche à l’eau, au gaz et à l’air. Il aurait aussi reçu un pistolet et si nécessaire d’autres armes, munitions et médicaments, mais aussi des lingots d’or, considérés comme un moyen de paiement ou de pot-de-vin idéal en période d’occupation.

On ignore combien de membres de l’armée secrète ont été formés dans le «jardin alpin». Par contre une chose est sûre: ils s’exerçaient à manier des armes, comme en témoigne une installation de tir à 25 mètres.

L’existence de la P-26 a été révélée en 1990, dans le sillage de l’affaire des fiches. Elle reste politiquement controversée jusqu’à présent. Une analyse historique fiable ne devrait être possible qu’après 2020, une fois que les archives seront accessibles.











avec, comme intervenant:
Jean-Philippe Aeschlimann, Ancien membre de P26 

Jacques-Simon Eggli: conseiller national libéral, membre de l'organe consultatif secret "groupe 426"

Martin Matter: Historien et ancien journaliste à la Basler Zeitung. Auteur de "P-26, die Geheimarmee, die keine war" dont la traduction en français est en court et sera disponible dans le courant de l'automne 2013 aux éditions Slatkine sous le titre "Le faux scandale de la P-26 et les vrais préparatifs de la résistance"

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